Textes :
Frères et sœurs, chers amis,
« Le Fils de l’Homme trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Cette question de Jésus est terrible et, il faut le reconnaître, un peu énigmatique. Jésus semble remettre en question voire douter, du projet même de Dieu son Père.
Dieu n’a-t-il pas créé l’homme pour le connaître l’adorer et le servir par le moyen de la foi ?
La foi, dit-on, est un don de Dieu. Dieu arrêterait-il de donner la foi ? Serait-il donc responsable du fait que le Fils de l’homme risque de ne pas trouver la foi sur la terre ?
Si elle est un don de Dieu, la foi est aussi une libre adhésion de notre intelligence et de notre volonté à ce Dieu auquel elle croit. La foi, c’est la confiance que je place en Dieu. Je reconnais à Dieu le droit et le pouvoir de donner son sens à ma vie et de la diriger.
Pour exister, ma foi bien qu’elle soit don de Dieu, a besoin d’une réelle humilité de ma part. Cette humilité dont nous parlons souvent depuis quelques dimanches et qui s’oppose à la prétention de trouver en moi-même le sens profond de mon existence.
C’est peut-être encore plus difficile de nos jours pour l’être humain aveuglé par les projets vertigineux de la science et de la connaissance.
Mgr Aupetit, l’archevêque de Paris, déclarait, à propos des progrès de la science, lors de la récente messe de rentrée des parlementaires : « Nos découvertes sont remarquables et vraiment admirables. Mais il ne suffit pas de briller au regard du monde…./… La vérité de notre cœur, la pureté de nos intentions seront jugées à l’aune de l’amour de Dieu. Alors –nous ne pèserons pas lourd. Heureusement le Christ, de condition divine, a pris la place du pauvre que nous sommes tous. En le suivant sur ce chemin d’humilité, nous sommes sûrs de ne pas nous tromper de route et d’accueillir une vérité qui se livre dans l’amour…/…Et il concluait son discours par une prière : Nous avons la science, puissions-nous avoir la sagesse ! » (Mgr Aupetit aux parlementaires, 15 octobre 2019)
Ce n’est pas la compétence technique qui fait la sagesse, mais le degré d’amour que nous mettons dans la mise en œuvre de cette compétence… Le juge “dépourvu de justice” de l’Évangile d’aujourd’hui en est la parfaite illustration… Son défaut n’est pas d’être incompétent. Il est probablement doué dans son domaine. Son défaut, c’est “de ne pas craindre Dieu et de ne pas respecter les hommes”…
La foi rejoint la “crainte de Dieu” qui n’est pas à confondre avec la trouille d’avoir des problèmes avec Lui ! La crainte de Dieu c’est le fait de savoir trouver notre juste place – toute notre place, rien que notre place – sous le regard de Dieu. C’est le fait de reconnaître que « Dieu est Dieu, nom de Dieu » comme disait Maurice Clavel ou que « Messire Dieu doit être premier servi » comme disait plus élégamment Sainte Jeanne d’Arc.
Dans l’évangile que nous venons d’entendre Jésus fait l’éloge de l’obstination dans la confiance et dans la prière… Il invite au vrai abandon qui est un acte volontaire et permanent, d’engagement sans réserve de tout notre être, dans une disponibilité à Dieu et à ce qu’il veut pour nous.
Cet acte d’abandon total de notre volonté entre les mains du Seigneur, s’enracine dans la foi et porte fruit dans la charité.
Comme la richesse et la force de l’enfant réside dans le fait de se recevoir totalement de ses parents et de s’abandonne à eux dans la confiance, celle de Jésus et la nôtre est de se recevoir totalement de notre Père qui est au Cieux.
« Pour être parfait, disait Dom Delatte, l’homme n’a qu’une chose à faire, c’est de ne rien faire ! C’est de s’abandonner à Dieu et de laisser celui qui est le seul agent, agir en lui.»[1]
Et c’est là qu’intervient la prière incessante à laquelle Jésus nous invite à l’exemple de la veuve de l’évangile… À l’exemple aussi de Moïse à Réphidim.
Moïse se tient sur le sommet de la colline, le bâton de Dieu à la main, levée vers le ciel… Quand il fléchit, et laisse retomber sa main, Aaron et Hour lui soutiennent les mains. Voilà une très très belle image de la “communion des saints.” Nous ne sommes pas seuls dans notre prière…
C’est à ça que sert la communauté… Quand l’un de nous fléchit, nous sommes invités à le soutenir dans son combat. C’est vrai pour les questions de santé, mais pas que ! C’est vrai aussi dans le ménage comme nous l’avons vu dans la formidable mobilisation pour le ménage hier matin à Allonnes…
Si nous sommes, ensemble, membres du Corps du Christ, n’ayons pas peur de vivre, ensemble, notre foi. Aidons-nous mutuellement, à garder les bras levés vers le Ciel et, avec le psalmiste redisons ensemble : « Je lève les yeux vers les montagnes : d’où le secours me viendra-t-il ? Le secours me viendra du Seigneur qui a fait le ciel et la terre. »
[1] Dom Delatte, abbé de Solesmes, Vivre à Dieu, Solesmes, 1973, p. 90.