Textes :
Frères et Sœurs,
Nous sommes réunis ce matin un peu comme les apôtres au Cénacle qui attendaient la réalisation de la promesse de Jésus au jour de l’Ascension : « Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre.»
Venus de divers coins de France et même d’au-delà, pour entourer les 6 jeunes qui vont prononcer leur Profession de Foi, nous célébrons non seulement l’anniversaire de la venue de l’Esprit sur l’Église naissante, mais aussi sur chacun d’entre nous.
« Vous n’avez pas reçu un esprit qui fait de vous des esclaves et vous ramène à la peur ; nous disait Saint Paul dans la deuxième lecture, mais vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; et c’est en lui que nous crions “Abba !”, c’est-à-dire : Père ! »
L’Esprit invite chacun d’entre nous à se lever et à se tourner vers Dieu en chantant : “Abba Père”.
Un vieux prêtre camerounais, mort en odeur de sainteté, disait de l’inhabitation de Dieu en nous : « Pour se mettre en présence de Dieu, point n’est besoin de se le figurer ailleurs qu’en nous où il gît, dans notre action où il agit, dans notre prochain où il vit.»[1]
Le grand Saint Irénée de Lyon, affirmait au 2ème siècle, : « L’Esprit est descendu sur [Jésus] le Fils de Dieu devenu Fils de l’homme, pour s’accoutumer à habiter dans le genre humain, à reposer sur les hommes, à résider dans l’ouvrage modelé par Dieu.» [2]
En descendant sur Jésus l’Esprit-Saint lui-même, voulait apprendre, en Jésus, à réaliser la volonté du Père quand on est un fils d’homme… Il est prêt, désormais, à habiter en nous et à nous apprendre à vivre en fils et filles de Dieu sans fuir notre condition humaine…
Enfoui en nous depuis notre conception dans le sein de notre maman, l’Esprit, comme stimulé, activé, éveillé par la grâce du baptême et de l’eucharistie fait de nous des témoins jusqu’aux extrémités de la terre.
Témoins de quoi ? De la présence et de l’action de Dieu dans notre monde et dans notre vie !
Témoins de qui ? Du Fils éternel de Dieu qui, en devenant l’un d’entre nous, fait de nous des frères.
Depuis que nous avons compris qu’en Jésus, Dieu s’est fait Homme, nous savons en effet que de toute éternité, l’idée, le projet de Dieu, c’est de faire de nous des fils et des filles à l’image de Jésus « Premier né d’une multitude de frères » (Rm 8, 29)
L’Esprit de Pentecôte nous envoie « annoncer la bonne nouvelle de la filiation divine de toute être humain.»[3] Il nous envoie annoncer et mettre en œuvre la fraternité universelle…
En prenant aujourd’hui à votre compte la profession de Foi de l’Église, Angèle, Noémie, Romane, Tania, Yann et Yoann, vous dites à vos parents qu’ils ont bien fait de vous baptiser quand vous étiez petits.
En vous plongeant dans la mort et la résurrection de Jésus le jour de votre baptême, vos parents vous ont mis sur un chemin sur lequel vous voulez vous engager vous-mêmes aujourd’hui…
C’est une belle opportunité de prendre cet engagement le jour de la Pentecôte où nous célébrons le don de l’Esprit à tous les croyants…
Alors mon premier conseil, à vous qui professez votre foi devant nous ce matin, mais aussi à tous ceux qui parmi nous partagent la foi chrétienne, c’est : « Vivez selon l’Esprit, puisque l’Esprit habite en vous ! »
« Si vous vivez selon la chair, nous dit Saint Paul, vous allez mourir ; mais si, par l’Esprit, vous tuez les agissements de l’homme pécheur, vous vivrez. »
Vivre selon l’Esprit en “tuant les agissements de l’homme pécheur” cela veut dire « Garder les commandements de Jésus », nous disait Saint Jean dans l’Évangile…
Or, les commandements de Jésus se résument en un seul : Aimer ! « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 13,34)
Vous savez bien comment Jésus nous a aimés… En donnant sa vie pour nous. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15,13)
« Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. » (Jn 15,14)
Mon deuxième conseil sera donc : « vivez en amis de Jésus ». Pour cela il vous faut prendre l’habitude de le rencontrer dans la prière personnelle, dans sa parole partagée avec les frères et sœurs chrétiens, dans l’eucharistie où il se fait nourriture pour notre vie…
Le père Peyriguère, disciple de Charles de Foucauld, disait : « Le Christ vit en vous… Pas un seul instant il ne vous quitte et par conséquent pas un seul instant vous ne le quittez. Quoi que vous fassiez, il est en vous, il est vous. Ne distinguez plus entre moments où vous êtes au Christ dans la prière et moments où vous êtes moins à lui. Continuellement vous êtes à lui et il est à vous.»[4]
« Il ne faut jamais qu’une âme s’absente de Dieu, puisque lui ne s’absente jamais de nous.»[5], nous dit Cécile Bruyère, première Abbesse bénédictine de Solesmes.
Vous savez bien qu’on ne peut pas être un bon musicien ou un bon sportif, ou un bon n’importe quoi sans prendre le temps de s’entraîner…
Il en est de même pour la vie chrétienne. Sans un minimum d’effort, vous ne pourrez pas tenir longtemps dans le monde difficile dans lequel nous vivons…
Gardez votre cœur ouvert au souffle de l’Esprit et votre main dans celle de Jésus… Il vous conduira au Père qui est le but de toute vie…
Viens, Esprit-Saint, habiter en nos cœurs, toi consolateur souverain, réconfort dans les pleurs, viens remplir jusqu’à l’intime le cœur de tous les tiens…
Viens, Esprit-Saint, ouvrir en grands les fenêtres de nos vies. Viens embraser nos cœurs… Pose tes langues de feu sur chacun et chacune d’entre nous, viens nous « envahir avec toute ta puissance et nous libérer de la faiblesse de l’égoïsme, du confort et de l’orgueil.»[6]
Aide nous à garder toute notre vie « le regard fixé sur Jésus, un regard d’enfant, plein d’admiration, de confiance, d’amour, clair, limpide… Cherchant à rencontrer son regard à Lui […/…] sans peur qu’il ne plonge dans les recoins cachés et ne nous demande tel ou tel renoncement, tel ou tel effort de pauvreté, de détachement, de charité…»[7]
Viens, Esprit-Saint, mets en nous ta lumière ! Allume en nos regards, le regard du Christ lui-même… Donne-nous de « voir Dieu et les hommes comme Jésus les voit »[8], Dieu comme un Père et les hommes comme des frères…
Toi l’Esprit commun du Père et du Fils, viens en nos cœurs, pour que vive à jamais la profession de Foi que nous allons renouveler en ce jour.
[1] J.B. Baskouda, Baba Simon, le Père des Kirdis, Le Cerf, Paris, 1988, p. 96.
[2] Irénée de Lyon, Contre les hérésies, Chapitre 3, 17,1-3
[3] Benoît XVI, Africae Munus, n° 8
[4] Cité par Michel Lafon, in Prier 15 jours avec Charles de Foucauld, Nouvelle Cité, Paris, 1998, pp. 49-50.
[5] Cécile Bruyère, In spiritu et veritate, Solesmes, 1966, p. 131.
[6] Cf. François, Gaudete et Exsultate, n° 65.
[7] Marguerite Poncet, Diaire 15, p. 2-3 – Novembre 1958.
[8] Grégoire Cador, On l’appelait Baba Simon, Pucac – Terre Africaine, Yaoundé, 2000, p. 156.