Homélie du 31 mars 2018

Alléluia, le Christ est ressuscité ! Il était mort, il est vivant !

Frères et sœurs,

De la Mort à la Vie, de l’esclavage à la liberté, du néant à l’existence… Ce soir il n’est question que de “Passage”… Pas très étonnant d’ailleurs puisque nous savons bien que le mot Pâques signifie justement passage… Nos frères juifs sont eux aussi, depuis vendredi soir, en train de célébrer « Pessah » la Pâque du peuple hébreu…

«Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées» disait Isaïe… Eh bien ce soir, nous avons la preuve qu’Isaïe a menti ! Ou plutôt disons qu’il s’est trompé… Mais comment pouvait-il imaginer ? : En Jésus les chemins des hommes sont devenus les chemins de Dieu… !

Je voudrais m’adresser particulièrement à toi cher Alexandre. Toi qui vas renaître par le baptême en cette vigile pascale.

Je m’adresse à toi mais à vous aussi “chrétiens de vieille souche”, que le baptême d’Alexandre rajeunit et ramène à la source…

Je m’adresse à chacun d’entre vous et je dis : “Éveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera.”(Eph 5,14)

En cette nuit sainte, nous attendons l’aube du 8ème jour de la création. Le jour où Dieu, dans la résurrection de Jésus, fait toutes choses nouvelles !

Une homélie très ancienne imaginait un dialogue entre Jésus et Adam dans lequel nous sommes invités à nous reconnaître tous. Je voudrais m’en inspirer ce soir… :

Jésus déclare « C’est pour toi, Adam, que moi, ton Dieu, je suis devenu ton fils ; c’est pour toi que moi, le Maître, j’ai pris la forme d’esclave ; c’est pour toi que moi, qui domine les cieux, je suis venu sur la terre et au-dessous de la terre.» [1]

En effet, je vous l’ai déjà souvent dit : En donnant sa vie sur la Croix, Jésus nous apprend ce que veut dire vivre en fils de Dieu quand on est un fils d’homme ! Il partage notre vie jusqu’en son tréfonds le plus sombre… pour la faire venir à la lumière et revenir de toutes formes de mort

Jésus continue : «C’est pour toi, l’homme, que je suis devenu comme un homme abandonné entre les morts ; c’est pour toi, qui es sorti du jardin, que j’ai été livré dans un jardin et que j’ai été crucifié dans un jardin, que j’ai été enterré dans un jardin.»[2]

Les premiers chrétiens avaient bien compris qu’en Jésus se trouve le nouvel Adam, l’Homme Nouveau venu relever chacun d’entre nous… Jésus est venu restaurer chacun de nous comme on restaure un vieux tableau ou une vieille demeure…

Alors, Fils d’Adam que nous sommes, écoutons-le, nous interpeller au moment de plonger ou de replonger avec lui dans les eaux du baptême qui nous font passer de la mort à la Vie.

  • Fils d’Adam, tu as vu le fouet déchirer mon dos et la poutre entailler mon épaule. Je suis venu porter avec toi le fardeau du monde. “Venez à moi vous qui ployez sous le poids du fardeau, mon joug est facile et mon fardeau léger” (Mt 11, 30)
  • Fils d’Adam, tu as vu mon visage tuméfié, couvert de crachats, souffleté, pour rejoindre toutes les blessures, sarcasmes et humiliations que tu infliges sans cesse à tes frères à travers le monde, en commençant par les plus démunis… “Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.” (Mt 25, 40)
  • Fils d’Adam, tu as vu mes mains clouées sur le bois. Elles viennent racheter les tiennes, agrippées au fruit défendu et à toutes les formes de pouvoir par lesquelles tu pensais t’épanouir. “Non pas ce que je veux, mais ce que tu..” (Mc 14, 36)
  • Fils d’Adam, tu as vu ma nudité sur le bois. Elle te rend la tienne dans toute sa dignité. Celle dont tu n’avais pas honte avant de te détourner du Père. “Me voici, Mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté.”… (Hb 10, 7)
  • Fils d’Adam, tu m’as entendu hurler ma soif sur la croix, pour guérir ton insatiable appétit de richesses éphémères auxquelles tu t’aliènes chaque jour. N’oublie pas : “Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir.”… (Ac 20, 35)
  • Fils d’Adam, tu m’as vu mourir à la manière d’un esclave, pour te libérer de ta liberté hollywoodienne qui t’invitre à faire n’importe quoi, pâle caricature de la liberté à laquelle mon Père t’appelle… Oui, “tout est permis, nous dit St Paul. Mais, il ajoute, tout ne construit pas !” (1 Cor 10, 23)
  • Fils d’Adam, tu as vu mon côté ouvert… Rappelle-toi le tien duquel est sortie Eve sans laquelle tu n’es rien… De mon côté à moi est née l’Eglise en laquelle je t’appelle à renaître… Tu as vu, en passant, c’est le geste d’un païen qui a fait jaillir la source de la Vie“Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive… De son cœur couleront des fleuves d’eau vive.” (Jn 7, 37)
  • Fils d’Adam, tu as entendu le silence assourdissant de la mort de Dieu ! En t’offrant ma vie sur la croix, Dieu donne toute sa Parole… Dieu te donne La Parole… C’est à toi qu’il revient désormais de la faire retentir… St Pierre te le rappelleras au jour de la Pentecôte : Sur mes serviteurs et sur mes servantes, je répandrai mon Esprit en ces jours-là, et ils prophétiseront » (Ac 2, 18) […] et il précisera “La promesse est pour vous, pour vos enfants et pour tous ceux qui sont loin, aussi nombreux que le Seigneur notre Dieu les appellera.” (Ac 2, 39)

Je m’arrête pour ne pas trop durer…

Ecoutons seulement, frères et sœurs, le Christ victorieux de la mort inviter Adam et nous, gisant avec lui et en lui dans les profondeurs de la mort et du péché.

Comme Lazare il nous interpelle : Sors d’ici mon frère ! Toi comme moi, nous ne sommes pas faits pour le tombeau… Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, va, et annonce le règne de Dieu.” (cf. Jn 11, 43 et Lc 9, 60)

“Debout les morts ! Le Christ est vivant !”

Bonne fête de Pâques à tous.

[1] Office des lectures du Samedi Saint.

[2] Idem.