Textes :
- Apocalypse 11, 19a ; 12, 1-6a.10ab
- Psaume 44, (45), 11-12a, 12b-13, 14-15a, 15b-16
- 1 Corinthiens 15, 20-27a
- Luc 1, 39-56
Frères et Sœurs, je voudrais méditer avec vous aujourd’hui sur le fait que l’accueil du Seigneur Jésus dans la vie de quelqu’un provoque sa mise en route… Nous connaissons tous le fameux « lève-toi et marche »… Eh bien, c’est ce qui se passe en Marie.
A l’occasion de la visite de l’Ange Gabriel, qui est le récit qui précède tout juste le texte que nous venons d’entendre dans l’Évangile de Luc, Marie apprend que sa vieille cousine Elisabeth est enceinte… Cela ne tombe dans l’oreille d’une sourde !
Après avoir accueilli sans réserve le projet de Dieu qu’elle mette au monde le Sauveur, “Marie se met en route et se rend avec empressement” chez sa cousine Elisabeth.
Jésus, désormais réellement présent en elle, Jésus qu’elle commence déjà à donner au monde en lui donnant la vie, la met debout et la fait marcher à la rencontre du baptiste, lui aussi dans le sein de sa mère.
Il y a quelque chose d’extrêmement étonnant dans la grossesse de Marie : Comment une jeune fille peut-elle conduire à la vie celui qui est l’auteur même de la vie ? Saint Paul ne nous disait-il pas, dans la deuxième lecture, que c’est dans le Christ que nous vivons et que nous revivrons. Or, nous apprenons, à l’Annonciation, que celui qui est la source de la vie a besoin de quelqu’un pour lui donner la vie !
Il a fallu, pour notre salut, que quelqu’un, (quelqu’une !) entende la volonté de Dieu et s’y rende disponible.
Sans le “Oui” de Marie pas de Sauveur ! Dieu, tout puissant qu’il est, ne pouvait pas, sans Marie, devenir l’un de nous…
C’est pour ça que la fête de l’Assomption est une grande fête !
Dans la fête du 15 août nous célébrons « l’élévation corps et âme de Marie à la gloire du ciel, et son exaltation par le Seigneur comme Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils ». Ce sont les termes utilisés par Pie XII en la fête de la Toussaint 1950 quand il proclame le dogme de l’Assomption au milieu de 800 évêques venus du monde entier pour l’occasion…
Cette fête de l’Assomption est un peu comme le “moteur de notre espérance chrétienne” Le moteur, c’est-à-dire ce qui met notre espérance en mouvement… Cette fête nous dit ce à quoi Dieu nous destine tous, dans le sillage de Marie…
En “assumant” Marie corps et âme, en la prenant dans ses bras pour l’éternité, Dieu réalise en elle le but pour lequel il a créé et sauvé chacun et chacune d’entre nous… En fêtant l’Assomption nous contemplons notre propre destinée… Nous comprenons que notre vie, à laquelle nous tenons tant, ne trouve son plein épanouissement qu’au-delà de la mort et grâce au “oui” que nous donnons, dès ici-bas, à la volonté de Dieu…
En ce jour de l’Assomption, nous voyons Marie “monter”. En elle, c’est chacun et chacune d’entre nous qui est invité à monter avec elle vers la Vie.
En fait, notre mission de baptisés aujourd’hui, est la même que celle de Marie : Il s’agit de mettre Jésus au monde, et lui permettre de grandir au milieu de nous…
Chacun et chacune d’entre nous, qui que nous soyons, quelles que soient nos capacités ou nos limites, quelles que soient nos responsabilités, quelles que soient nos compétences, nous sommes invités à répondre à cet appel : « Veux-tu mettre Jésus au monde ? Veux-tu accueillir l’auteur de la Vie (avec une majuscule) et, à travers l’épaisseur de ta pauvre vie, le conduire à la Vie en plénitude”… Veux-tu apporter ta pierre à la réalisation de son projet d’être “tout en tous” ? » (Cf. 1 Cor 15,28)
Être chrétien, ce n’est pas une affaire de dimanche ou de 15 août. Être chrétien, ce n’est pas d’abord une affaire de chorale, de groupe liturgique ou que sais-je encore. Être chrétien, c’est accueillir un parole qui nous dit : “Au nom de Jésus, lève-toi, va vers tes frères et prend avec eux le chemin de la Vie.”
Je vous propose, aujourd’hui, de prier spécialement pour nos familles particulières et pour les familles en général dont certains semblent s’occuper activement à déconstruire les repères…
Marie (avec Joseph ne l’oublions pas), a reçu la mission d’éduquer Jésus. C’est-à-dire de conduire Jésus à lui-même. C’est le rôle de la Sainte Famille. C’est le rôle de toute famille…
Jésus, le seul qui mérite le nom de Maître, a eu besoin de Marie, comme il a besoin de chacun et chacune d’entre nous aujourd’hui, pour être “conduit à Lui-même”.
Dieu a confié son Fils à une famille pour qu’il apprenne de ses parents ce qu’est l’obéissance d’un fils de Dieu devenu fils de l’homme…
Cette obéissance, Jésus l’a appris sur les genoux de ses parents qui ont su l’accueillir sans l’accaparer bien sûr, mais sans non plus renoncer à leur responsabilité d’éducateurs.
Prions pour les parents qui ont la lourde tâche de conduire leurs enfants à la Vie. Donner la vie ne consiste pas seulement, passez-moi l’expression, à “pondre des enfants”, mais à les accueillir pour ce qu’ils sont : des vivants que Dieu nous confie pour les conduire à la Vie…
“Je te reçois et je me donne à toi” se disent les nouveaux époux lors de la célébration de leur mariage… Cette réalité se prolonge dans la transmission de la vie… “Nous te recevons et nous nous donnons à toi” devraient dire les parents à l’enfant qu’ils accueillent… Rien à voir avec la pratique courante du : “je te prends, je te possède et je te jette quand je n’ai plus besoin de toi !” qui engendre la culture de déchets dont parle si souvent notre bien-aimé Pape François.
Conduire les enfants vers la Vie, c’est se mettre en marche avec eux, apprendre à marcher à leur rythme, mais aussi leur apprendre à marcher au rythme que Dieu leur propose. Il ne s’agit pas de leur dire : “Regardez la vie c’est par là, allez-y si vous voulez.” Non, il s’agit de prendre la route et de leur proposer de la prendre avec nous.
Parents, ne soyez pas spectateurs de l’éducation de vos enfants, vous êtes responsables, acteurs de cette éducation. C’est un engagement de tous les jours, comme l’est toute vie chrétienne. C’est un travail, un travail que Dieu nous confie.
Un autre aspect que je voudrais retenir aujourd’hui de l’attitude de Marie c’est son rapport à la richesse. Dans le monde matérialiste dans lequel nous vivons il est bon de se mettre à son école.
Marie sait que toute richesse ne prend son sens que dans le partage… et que ce n’est qu’en vivant une réelle humilité que l’on devient riche aux yeux de Dieu.
Quand Marie dit : “Il s’est penché sur son humble servante. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides”, elle nous dit : “Il n’y a de vraie richesse qu’en Dieu.” “L’argent n’est pas fait pour nous enrichir, mais pour être partagé.” Celui qui veut accaparer la richesse pour soi ; que ce soit l’argent, les compétences, les connaissances, etc., devient sourd à tout et aveugle à tous. Il est tellement préoccupé par lui-même que ça devient un problème. Mais, c’est lui le problème, ce n’est pas l’argent !
Marie est riche de sa pauvreté parce que ce qui fait sa richesse c’est qu’elle est totalement disponible à Dieu et à son prochain.
C’est pour ça que l’Église, dans sa sagesse, a toujours su qu’elle pouvait s’adresser à Marie pour obtenir les grâces que seul Dieu peut donner… Marie, pleine de grâce, ne nous donne que ce qu’elle reçoit de Dieu : Jésus unique Sauveur du monde.
Accueillant Jésus elle se met en route vers sa vieille cousine Elisabeth qui a besoin d’elle et vers chacun d’entre nous qui avons tant besoin nous aussi de la visite du Sauveur…
Pauvres pécheurs que nous sommes, prie pour nous, Marie… Maintenant et à l’heure de la mort !
Amen