1ère lecture : Livre du Deutéronome 4,1-2.6-8
Psaume 14
2ème lecture : Lettre de saint Jacques 1,17-18.21b-22.27
Evangile selon saint Marc 7,1-8.14-15.21-23
Ta règle a sur nous-mêmes un droit sacré ; je suis faible, tu m’aimes, je maintiendrai.
– échos à la prière scoute chantée la semaine dernière, aux bons souvenirs, aux jeunes partis en camp cet été
– il est question de règle
– il y a bien des échos avec l’actualité. La règle, la loi. Est-elle bonne ? Jusqu’où la suivre ? En termes de bioéthique, de questions économiques, sociales, sanitaires, etc… Que nous dit la loi de Dieu, la loi des hommes ? Et nous comme chrétiens, comment sommes-nous obéissants à l’une comme à l’autre ? Et d’ailleurs faut-il obéir à l’une ou à l’autre ? Aux deux ? À aucune des deux ?
– Père Grégoire dans son homélie la semaine dernière nous a donné de bons éléments de discernement sur ces questions. Et aujourd’hui la parole de Dieu, dans la 1ere lecture nous rappelle de ne rien enlever à la loi de Dieu, et la 2nde lecture nous rappelle que nous sommes dans le monde, on ne peut donc s’en défausser. Mais là 1ere lecture comme la 2e lecture nous rappellent surtout que la loi de Dieu est faite pour que nous vivions, pour l’amour, et que notre comportement dans le monde est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse, et de se garder sans tache au milieu du monde.
– oui la règle de Dieu, sa loi d’amour a sur nous-mêmes un droit sacré ; oui nous sommes bien petits et faibles devant la grandeur de son amour ; mais oui nous sommes sûrs de son amour qui nous permet de maintenir, c’est-à-dire de nous garder sans tache devant Dieu et au milieu du monde.
– donc oui nous pouvons garder ce couplet du chant de la promesse scoute : ta règle a sur nous-mêmes un droit sacré je suis faible tu m’aimes je maintiendrai. Cela pourrait bien exprimer l’attitude de Jésus dans l’Évangile.
Regardons d’un peu plus près ce que nous dit le Seigneur dans les textes du jour.
1/ La beauté, la bonté de la Loi
La Loi de Dieu est bonne.
Torah c’est la loi. Deutéronome c’est la 2eme loi, comme pour en remettre une couche.
La première lecture nous montre la beauté de la Loi. C’est par elle que Dieu éduque, ce que confirme saint Paul qui voit en elle un « pédagogue ».
Dans notre relation à Dieu
On ne peut prétendre aimer Dieu et faire n’importe quoi. La Loi a été donnée pour indiquer comment vivre l’alliance avec Dieu.
Pour nous-mêmes
Une forme de mode d’emploi pour nous accompagner, nous aider à nous accomplir comme homme et comme femme. Certains choix nous font grandir dans notre humanité, d’autres nous détruisent. La Loi indique le chemin de notre propre bonheur. Nous ne sommes pas faits pour les travers que Jésus mentionne dans l’Évangile : « inconduite, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, etc. Nous sommes faits pour l’amour.
Comme le dit très bien la première lecture : Dieu a donné la Loi pour que nous vivions. Le Seigneur comme un bon père, une bonne mère, ne peut pas supporter que ses enfants se fassent mal sans nous en avertir. Dieu est proche, Dieu n’est pas du tout indifférent à ce que nous faisons. Oui vraiment, le Seigneur nous veut vivants[1] et nous donne sa loi pour que nous vivions de son amour, c’est pour cela que nous sommes faits.
Pour la vie en société
La Loi a été donnée à la sortie d’Égypte, à un moment où Israël n’était pas encore un peuple. La Loi est importante aussi pour la vie en société et pour structurer le peuple de Dieu. De la même manière, les lois qui régissent nos pays sont là pour nous structurer, nous établir en société, en peuple. En prenant soin, en protégeant les plus petits, les plus fragiles.
2/ Les limites de la Loi
La multiplication des commandements
Au fur et à mesure de l’histoire, les Juifs ont multiplié les commandements : il y en a 613[2] ! Dont 365 négatifs (ne fais pas ceci, cela) comme pour indiquer une chose à ne pas faire chaque jour. On pourrait penser que le but est de mieux baliser le chemin en multipliant ainsi les préceptes. Mais rappelons que la morale chrétienne, l’enseignement de l’Evangile pour notre manière de vivre, n’est pas là d’abord pour nous inciter à éviter de faire le mal, mais plutôt pour nous encourager à faire le bien. La limite d’une telle multiplication des préceptes à respecter est de se rassurer. On veut être sûr d’être dans les clous. On peut bien cocher toutes les cases. Et alors nous pensons « gagner » notre ciel. Mais en réalité, nous n’avons pas besoin de gagner l’amour de Dieu ; son amour nous est déjà acquis.
Le risque est donc de s’arrêter sur une règle extérieure en oubliant son principe, son fondement.
Le risque du formalisme
C’est le risque de porter davantage son attention sur les comportements extérieurs que sur l’attitude du cœur, sur le paraître que sur l’être. Avec tous ces préceptes, le risque est grand de donner plus d’importance aux gestes et aux rites extérieurs qu’aux dispositions du cœur, le désir d’apparaître plutôt que d’être bons.
Le plus bel idéal religieux a ses écueils : la rigueur d’observance peut engendrer une trop bonne conscience et rendre méprisant pour ceux qui n’en font pas autant. Ainsi on peut facilement tomber dans le jugement, en séparant les bons d’un côté et les mauvais de l’autre. Or le projet de Dieu n’est pas de nous voir séparés mais rassemblés dans son amour.
Un seul sauveur
Nous le comprenons donc, la loi, par elle-même, ne peut pas nous sauver. Même lorsqu’il s’agit de la loi de Dieu. C’est seulement Jésus qui nous sauve[3] et nous fait le don de son Esprit Saint pour renouveler notre cœur.
Conclusion : « c’est la miséricorde que je veux et non les sacrifices »
Faut-il se laver les mains pour respecter les règles sanitaires ou les préceptes de la Torah comme le font scrupuleusement les pharisiens ? Peut-on se salir les mains au nom d’un idéal, comme dans la pièce de théâtre de Jean-Paul Sartre « Les mains sales » ? On a vu que la Loi de Dieu et aussi celle des hommes, nous aident, nous donnent des pistes pour éclairer notre manière de nous comporter. On a aussi vu que la loi, que ce soient les commandements de la Bible ou les lois des hommes, ne suffit pas, elle ne sauve pas. Jésus ne nous invite pas à abolir la loi mais à l’accomplir.
Comment l’accomplir ? Pour Jésus, il ne s’agit plus de nous laver les mains mais de nous laver les pieds les uns les autres, comme pour exprimer de manière concrète son commandement de nous aimer les uns les autres. Jésus nous appelle non pas d’abord au sacrifice, malgré tout ce qu’il a de beau, de bon, de respectable, d’honorable. Jésus nous appelle d’abord et avant tout à la miséricorde. Un cœur miséricordieux, un cœur sur lequel la loi d’amour de Dieu est gravé (comme l’annonçait le prophète Ezéchiel), c’est le cœur pur de celui et de celle dont le comportement devant Dieu et au milieu du monde est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse (cf. Saint Jacques, 2ème lecture). C’est le cœur qui est généreux, serviable, se donne sans compter, se dépense sans attendre d’autre récompense que celle de savoir qu’il fait la volonté de Dieu (cf. Prière scoute[4]).
Oui Seigneur, ta règle a sur nous-mêmes un droit sacré ; je suis faible, tu m’aimes, je maintiendrai.
[1] Dieu nous veut vivants ! Saint Irénée le dit ainsi : « la gloire de Dieu c’est l’homme vivant ». St Irénée luttait contre les hérésies de son temps, des mauvaises interprétations de la foi et notamment ce qu’on appelle la gnose. Mais ne croyons pas que cela soit du passé ! Nous aussi sommes en proie à ce type d’hérésie, on retombe toujours dans nos vieux travers. La gnose c’est se borner à une connaissance intellectuelle de la foi. Le risque c’est de rester dans le “je sais” et non dans le “je vis car Christ vit en moi”. Pour saint Irénée, il s’agit de saisir tout ce qui sépare la foi chrétienne d’une gnose, d’une simple connaissance. En effet, est-ce qu’à l’annonce de la grande nouvelle le soir de Pâques, « Il est vraiment ressuscité ! », est-ce qu’à l’annonce de cette grande nouvelle qui est le cœur de notre foi nous répondons mécaniquement par un triste « je sais » de gnostique.. ? Ou bien est-ce qu’on s’émerveille de tout ce que cet évènement signifie pour notre vie, comme l’un de ces petits enfants auquel l’Evangile promet d’entrer au Royaume ?!
[2] La Loi comporte 613 commandements, divisés par Moïse Maïmonide en 248 mitzvot (prescriptions) positives, et 365 mitzvot négatives.
[3] Le nom de Jésus signifie « Dieu sauve ».
[4] Prière scoute :
Seigneur Jésus,
Apprenez-nous à être généreux,
A Vous servir comme Vous le méritez
A donner sans compter,
A combattre sans souci des blessures,
A travailler sans chercher le repos,
A nous dépenser, sans attendre d’autre récompense,
que celle de savoir que nous faisons Votre Sainte Volonté.