Homélie du 30 août 2020

Textes :
   Jr 20, 7-9
   Ps 62 (63), 2, 3-4, 5-6, 8-9
   Rm 12, 1-2
   Mt 16, 21-27

 

« Passe derrière moi Satan tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes »

« Seigneur tu m’as séduit, et j’ai été séduit ; tu m’as saisi, et tu as réussi.»

Ces deux versets entendus ce matin résument à mon avis l’enjeu de notre marche à la suite du Christ… Cette marche consiste à nous laisser “happer”, “saisir” par le Christ tout en gardant la maîtrise de notre destin personnel.

Il s’agit en fait, comme le dit saint Paul dans la deuxième lecture, de « ne pas prendre pour modèle le monde présent mais de nous transformer en renouvelant notre façon de penser pour discerner ce qui est bon, et capable de plaire à Dieu »

C’est de la délicate gestion de notre liberté dont nous parlent finalement les textes de la liturgie d’aujourd’hui. Cette liberté qui est sans doute la plus belle expression de notre dignité.

Qu’il s’agisse de Jean-Jacques Auduc, plus jeune résistant français en mémoire de qui la messe été célébrée samedi soir à Arnage, ou de Marie dont nous allons célébrer tout à l’heure le baptême. Qu’il s’agisse de tous ceux que nous avons appelé un peu hâtivement “les héros de l’ombre”, au début de la pandémie qui nous travaille et qui finalement ont vécu au jour le jour leur devoir d’état, la question est la même : « Où vais-je trouver et puiser ce qui va donner tout son sens à ma vie ? » En ce temps de rentrée et nouveau départ, elle peut nous aider à vivre un bon discernement.

Jérémie, Saint-Paul et Jésus, sont tous d’accord aujourd’hui, pour affirmer que c’est en Dieu et en Dieu seul que notre vie trouve sa source et son aboutissement.

« Ta parole est en moi comme un feu dévorant » déclare Jérémie en avouant son incapacité à la maîtriser cette parole…

Sé/duit par Dieu, il se laisse con/duire par Lui malgré l’adversité et la persécution incessante que cela entraîne.

Il est clair pour Jérémie que Dieu seul est maître de son existence. Sa vie va être une perpétuelle recherche d’ajustement à celui dont la parole l’a touché au cœur et jusqu’à l’os !

Paul, dont on sait combien sa rencontre avec le Christ à totalement bouleversé la vie, nous exhorte quant à lui, à présenter notre vie tout entière « en sacrifice vivant capable de plaire à Dieu.»

Le mot sacrifice vient du latin “sacrum-facere” et signifie “rendre sacré”, “faire du sacré”, avec l’idée de “donner à Dieu” ou consacrer…

Faire de sa vie un sacrifice vivant cela signifie donc, pour les enfants de Dieu que nous reconnaissons être, laisser s’ex/primer, s’ex/térioriser, la sainteté inscrite au plus profond de chacune de nos vies depuis le jour de notre création à son image et depuis le don de l’Esprit-Saint reçu au jour de notre baptême. Pour cela il nous faudra rester attentifs « à la volonté de Dieu, à ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire.»

C’est un combat de tous les jours – ne l’oublie jamais Marie et n’oublie pas non plus de l’enseigner à Jules qui s’engage dans le sillage de ton engagement : C’est la volonté de Dieu et non notre sentiment qui doit mener notre vie.

Saint Pierre lui-même a mis du temps avant de le comprendre. Et même si dimanche dernier Jésus le déclarait bienheureux d’avoir reçu une révélation de Dieu lui-même, il n’hésite pas aujourd’hui à le remettre dans l’axe  un peu violement en le traitant de Satan et d’occasion de chute parce que “ses pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes.”

En ce qui nous concerne, cela veut dire très concrètement que notre baptême, même s’il fait de nous des membres du Christ, ne doit pas pour autant nous rendre prétentieux mais, bien au contraire, vigilants et attentifs, avec Jésus, à la volonté du Père.

Ayant accepté joyeusement que « notre vie ne soit centrées sur nous-même mais sur Jésus qui est mort et ressuscité pour nous » (2 Cor 5,15), il nous reste à marcher avec le Christ portant sa croix et à laisser à Dieu le soin de « sauver notre vie » au lieu de vouloir à tout prix la sauver par nous-même. En effet « celui qui veut sauver sa vie la perdra mais qui perd sa vie à cause de moi la trouvera.»

Jésus nous fait comprendre que c’est Dieu qui tient notre vie en sa main et que, quelles que soient les épreuves, il  nous invite à nous y blottir comme un enfant se blottit contre sa mère…

Comprenons avec le psalmiste aujourd’hui que “l’amour de Dieu vaut mieux que la vie”… Reconnaissons que notre vie et notre chair, loin de Dieu sont comme “une terre aride, altérée, sans eau.”

Attachons notre âme à Dieu. Laissons sa main droite nous soutenir et sa parole nous rassasier.

C’est en tout cas ce que je nous souhaite. À toi Marie ainsi qu’à chacun d’entre nous.