Textes :
- Joël 2, 12-18
- Psaume 50 (51), 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17
- 2 Corinthiens 5, 20 – 6, 2
- Matthieu 6, 1-6.16-18
« Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! » …
« Frères, nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. »
Voilà les deux appels lancés, l’un par le prophète Joël dans la première lecture et l’autre par l’apôtre Paul dans la seconde, qui nous invitent à entrer dans le temps du Carême.
Il s’agit bien d’une invitation… Elle s’adresse donc à notre liberté individuelle, à notre conscience personnelle…
Bien que l’appel soit lancé au cœur de la communauté rassemblée, chacun de nous est concerné à son propre niveau, personnellement, en son for intérieur…
Chacun est instamment invité à la conversion, au retour à Dieu, à la réconciliation. « En tant que coopérateurs de Dieu, nous vous exhortons à ne pas laisser sans effet la grâce reçu de Lui », précise saint Paul.
Pour ça, pas besoin de grandes démonstrations extérieures, bien au contraire…
L’Évangile est très clair : « Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l’accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer. Sinon il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux Cieux.»
Le geste de l’imposition des Cendres qui va nous être proposé tout à l’heure est un geste d’humilité, de reconnaissance de ce que nous sommes réellement, devant Dieu tel qu’il est réellement !…
Nous ne sommes que poussière tirée de la poussière par l’amour de Dieu qui nous appelle à l’existence. Nous y retournons irrévocablement quand nous lâchons la main de Dieu.
La grande actrice de ce temps de Carême, c’est notre liberté ! Celle que nous avons de garder notre main dans la main de Dieu ou de revendiquer notre autonomie au point d’oublier « qu’en dehors de Dieu nous ne pouvons rien faire… » (cf. Jn 15,5)
Il est vrai que c’est un peu difficile dans le monde d’aujourd’hui de croire qu’en dehors de Dieu nous ne pouvons rien faire.
Quand il voit ce que la science et la technologie lui permettent de réaliser, l’homme moderne a tendance à se croire tout-puissant et à en conclure qu’il n’a plus besoin de Dieu.
Depuis Adam au jardin des origines, rien n’a changé dans le cœur de l’homme. Le persifleur rampant est toujours là pour lui susurrer au creux de l’oreille : « Tes yeux s’ouvriront, et tu seras comme un dieu, connaissant le bien et le mal. » (cf. Gn 3,5) Nous oublions facilement que notre capacité d’aimer et de créer nous vient “d’en haut”…
Dans un élan écologique précurseur, Job résistant à l’idée de maudire Dieu, s’écrit du fond de sa détresse : « interroge le bétail, il t’instruira, l’oiseau du ciel, il te renseignera ; parle avec la terre, elle t’apprendra ; ils te raconteront, les poissons de la mer. Qui ne sait, parmi tous ces êtres, que la main du Seigneur a fait cela, lui qui tient dans sa main l’âme de tout vivant et le souffle de toute créature humaine ? » (Job 12,7-10)
Ne soyons pas plus “bêtes” que du bétail ! Au seuil de ce Carême 2019, revenons donc au Seigneur notre Dieu…
Pour ce “retour” l’Église nous propose entre autres, à la suite de l’évangile que nous venons d’entendre, trois attitudes : L’aumône, la prière et le jeûne.
Avec les enfants du KT samedi dernier nous avons utilisé le moyen mnémotechnique connu des trois “P” auxquels il faudrait ajouter un quatrième :
P comme Partage (Aumône)
P comme Prière
P comme Pénitence ou Privation (Jeûne)
Alors je vous propose de retrouver notre cœur d’enfant qui n’est pas encore complètement éteint en nous j’espère.
En écoutant les jeunes, essayons de voir ce qui pourrait nous aider au long de ce Carême à préparer une fête de Pâques qui soit vraiment résurrection pour chacun d’entre nous et pour notre communauté… :
(Appeler les enfants qui viennent lire les trois P)
P comme partage :
- Parler à quelqu’un avec qui j’ai du mal à parler.
- Donner à quelqu’un un objet auquel je tiens et qui lui fait plaisir.
- Dire la vérité avec douceur et pour le bien des autres, pas pour leur faire du mal.
- Chercher comment faire plaisir autour de moi.
- Ne dire que du bien des autres.
- Ne pas écouter les paroles méchantes.
- Sourire à tous.
- Partager mes connaissances ou mes compétences avec ceux qui me le demandent.
- Faire un geste pour quelqu’un qui en a besoin (visite, lettre, mail, téléphone…)
- Prendre du temps avec quelqu’un, juste pour lui faire plaisir.
P comme Prière :
- Soigner ma prière du soir.
- Faire un coin prière dans ma chambre.
- Prendre 5 minutes pour prier le notre Père.
- Aller à la messe le dimanche.
- Rentrer dans une église est rester 5 minutes devant le tabernacle pour prier.
- Ne pas traîner au lit. Se lever pour avoir le temps de prier dès le matin.
- Prier Marie.
- Prier avant le repas.
- Rendre grâce en contemplant la nature.
- Lire une page de la Bible.
P comme Pénitence ou Privation :
- Ne pas penser qu’à moi, ne pas me mettre en avant.
- Faire sérieusement le travail qui me revient chaque jour.
- Sauter mon goûter et offrir ce sacrifice pour ceux qui ne croient pas en Dieu.
- Arrêter ma télé ou mon ordinateur pour me promener en famille.
- Laisser les autres se servir avant moi.
- Retenir ma langue quand elle veut trop parler.
- Offrir mes difficultés quotidiennes sans râler.
- Préparer ma confession et aller voir un prêtre.
- Ne pas m’attacher aux biens matériels.
- Faire une tirelire pour les pauvres.
Merci aux jeunes. Il y aurait bien d’autres démarches possibles à vivre pour nous permettre de revenir à la fraîcheur de l’engagement de notre baptême à la suite de Jésus.
N’ayons pas peur de « revenir au Seigneur notre Dieu, nous dit Joël, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.»
Toutes les attitudes que les jeunes nous ont proposées sont au fond des choses toute bêtes et toute simples. Et c’est peut-être justement pour cela qu’elles sont difficiles !
Ne soyons pas comme Naaman le Syrien qui voulait refuser les gestes tout simples que lui proposait le prophète Elisée pour guérir de sa lèpre… Comme lui, laissons-nous raisonner par les humbles et les petits : « Si le prophète t’avait ordonné quelque chose de difficile, tu l’aurais fait, n’est-ce pas ? Combien plus, lorsqu’il te dit : “Baigne-toi sept fois dans le Jourdain et tu seras purifié.”» (2R 5, 13-14)
Descendons tout simplement du char de notre orgueil et de notre suffisance. Plongeons sept fois de suite dans le bain de l’humilité et avec le psalmiste redisons à Dieu : « Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. …/… Rends-moi la joie d’être sauvé ; que l’esprit généreux me soutienne. »
Bon Carême à tous et à chacun.