Textes :
- Actes des Apôtres 4,8-12
- Psaume 117 (118), 1.8-9,21-23, 26.28-29
- 1ère lettre de Saint Jean 3, 1-2
- Évangile de Jean 10, 11-18
Frères et sœurs, aujourd’hui nous célébrons le dimanche du Bon Pasteur.
Naïs, Colleen, Arthur, en faisant votre première communion aujourd’hui au sein de notre communauté rassemblée, vous nous invitez à méditer sur un élément essentiel de notre vie chrétienne : recevoir le corps de Jésus en nourriture pour notre vie.
Certains d’entre nous font cela chaque dimanche et même pour certains chaque jour, depuis plus de 75 ans…
Régulièrement, les chrétiens se rassemblent pour se nourrir de la vie de Jésus parce qu’ils savent que « Sans le Seigneur ils ne peuvent rien faire »… (Cf. Jn 15,5)
Vos parents, vous ont transmis la vie qui coule dans vos veines, mais cette vie, ils le savaient bien, elle vient d’en haut, elle vient de Dieu. Vos parents ont reconnu que vous êtes d’abord et avant tout des enfants de Dieu, comme nous le rappelait la lettre de Saint Jean tout à l’heure. C’est pourquoi ils ont voulu que vous soyez baptisés. C’était leur décision personnelle… Ils ne vous ont pas demandé votre avis… Et c’était bien comme ça ! Ils ont fait pour vous le choix de ce qui leur semblait important.
Aujourd’hui, c’est vous, personnellement, qui vous engagez devant nous, à reconnaître en Jésus celui qui donne tout son sens à votre vie de fils ou de filles de Dieu.
Vous allez répondre “Oui” à l’appel de Jésus qui se propose de se faire nourriture de votre vie.
Alors, je m’adresse à la communauté : Est-ce bien raisonnable de faire communier des enfants qui vivent dans un monde où Dieu n’a plus vraiment sa place ? Un enfant de 10 ans peut-il vraiment avoir conscience de ce qu’il fait en communiant ?
Je réponds moi-même à cette question en l’élargissant : Qui parmi nous a réellement conscience de ce qu’il fait en recevant le corps du Christ en nourriture ? Est-ce bien raisonnable d’ailleurs de la part de Jésus de prétendre donner sa vie en nourriture ? Si l’on en croit la réaction de ses disciples quand il leur déclare « De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. » (Jn 6, 57) on peut en douter ! « Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent : “Cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ?” […/…] Et à partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner. » (Jn 6, 60.66)
Si nous sommes là aujourd’hui pour communier et pour nous réjouir avec vous, de votre communion Naïs, Colleen et Arthur c’est que comme Saint Pierre, nous répondons à Jésus qui demande à ses apôtres « Voulez-vous partir, vous aussi ? » : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle.» (Jn 6, 67-68)
Nous ne sommes pas ici dans une démarche de compréhension intellectuelle, mais dans une démarche d’intelligence éclairée par la foi, une démarche qui essaie “lire et de comprendre les choses de l’intérieur” (intus-legere)… Une démarche d’accueil et de confiance dans les paroles de Jésus. Qui peut prétendre avoir fait le tour de la question ? Si nous avions pleine conscience de ce que nous faisons en recevant le corps du Christ il est probable que nous nous évanouirions.
Communier au Christ qui se donne corps et sang en toute eucharistie, c’est tout simplement appliquer ce que disait le psalmiste tout à l’heure : “Mieux vaut s’appuyer sur le Seigneur que de compter sur les hommes ; mieux vaut s’appuyer sur le Seigneur que de compter sur les puissants !” Communier c’est nous en remettre à celui qui seul peut nous sauver.
Saint-Pierre, encore lui, l’a bien compris, qui déclarait dans la première lecture : « En nul autre que Jésus, il n’y a de salut… Aucun autre nom n’est donné aux hommes, qui puisse nous sauver ! »
En communiant, avec Jésus, par Lui et en Lui, nous entrons dans la con/naissance de Dieu.
Dans l’évangile que nous venons d’entendre, Jésus n’hésite pas à s’attribuer le titre de bon pasteur : « Moi, je suis le Bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et, précise-t-il, je donne ma vie pour mes brebis. »
Pourquoi le bon pasteur donne-t-il sa vie pour ses brebis ? Parce qu’il aime Dieu et que, aimant Dieu il cherche à faire sa volonté… Or la volonté de Dieu, nous dit Jésus, c’est qu’il donne sa vie pour ses brebis. Le projet de Dieu c’est que le monde ait la vie, c’est de partager la vie que Lui seul possède en plénitude…
Il ne s’agit pas, pour Jésus, de subir un châtiment comme si Dieu exigeait la mort de son fils pour apaiser sa colère, mais d’entrer dans le grand mouvement de la vie partagée.
Jésus reste tout entier maître de sa vie jusque dans l’offrande de la croix que nous rappelons en chaque eucharistie. « Ma vie, nul ne peut me l’enlever : je la donne de moi-même », avons-nous entendu.
Dieu veut nous donner Sa Vie. Pour cela il nous envoie son Fils qui nous donne La Vie que, de toute éternité, il reçoit de son Père, pour qu’à notre tour nous donnions cette vie reçue à nos frères et sœurs en humanité…
Dieu, par Jésus, nous invite à entrer tous, et chacun à notre place, dans ce grand mouvement d’amour et de partage.
Bien sûr, que nous ayons 10 ans ou 90 ans, cela nous dépasse complètement ! Mais est-ce pour autant idiot ?
Nous les humains, nous avons la foutue prétention de vouloir tout maîtriser, comme si nous étions les maîtres de la Vie…
Jésus nous rappelle que nous ne sommes pas les maîtres de la vie, mais les bénéficiaires de cette vie partagée qu’il nous confie…
Alors, entrons simplement dans l’accueil de la Vie…
Mais, pour recevoir l’Eucharistie, nous avons besoin du service des prêtres que Jésus appelle à « recevoir l’offrande du peuple saint pour la présenter à Dieu » (rituel de l’ordination d’un prêtre), et à rompre le pain en son nom et en mémoire de Lui, comme il nous a dit de le faire. (Cf. Lc 22,19)
En ce dimanche du Bon pasteur, prions pour que du sein de nos communautés se lèvent des personnes qui entendent cet appel et y répondent. Ne nous contentons pas de rendre grâce pour les ordinations prochaines d’Antoine et de Gaël ; prions, supplions le Seigneur d’ouvrir le cœur de ceux qu’il appelle à son service et à notre service. Qu’ils y répondent généreusement…
Alors chacun de nous et ensemble nous pourrons chanter avec le psalmiste :
« Tu es mon Dieu, je te rends grâce, mon Dieu je t’exalte ! Rendez grâce au Seigneur : il est bon ! Éternel est son amour ! »