Textes :
- Exode 12, 1-8.11-14
- Psaume 115 (116b), 12-13, 15-16ac, 17-18
- 1 Corinthiens 11, 23-26
- Jean 13, 1-15
Frères et sœurs.
En ce jour, nous célébrons l’institution de l’Eucharistie comme mémorial du sacrifice unique et définitif que le Seigneur Jésus a fait de sa vie pour notre salut.
C’est aussi l’occasion de célébrer l’institution du ministère diaconal et presbytéral.
J’en profite donc pour vous demander de prier pour les prêtres et diacres que nous sommes, ordonnés à votre service.
Je sais que nombre d’entre vous le font déjà régulièrement et je voudrais les en remercier du fond du cœur. Mais, permettez-moi de vous demander de redoubler d’efforts. Nous en avons grand besoin en ce temps de pandémie ou tant de repères sont ébranlés dans leur fondement.
Être pasteur en temps de crise n’est pas une tâche aisée, à moins de s’en remettre totalement au seul bon berger, même s’il semble dormir au fond de la barque secouée par la tempête.
S’ajoute à cela le scandale incommensurable de la pédocriminalité au sein de notre institution ecclésiale qui après avoir traumatisé des centaines de vie d’enfants de Dieu, nous traverse de part en part en continuant son œuvre destructrice en chacun d’entre nous.
Horrifiés avec vous par les révélations successives de ces dernières années, nous voulons, avec vous, prendre les moyens de prémunir notre église bien-aimée d’une telle lèpre.
Institués “intendants des mystères de Dieu”, nous avons reçu la charge de “nourrir” la communauté chrétienne, par la parole, par l’exemple et par l’administration des sacrements.
Notre rôle est d’alimenter en vous la conscience qu’ensemble, depuis le jour de notre baptême, nous sommes le corps du Christ à l’œuvre en ce monde.
Notre souci permanent de ministres ordonnés, est de maintenir notre communauté, dans son ensemble, en tenue de service, à l’image du Christ serviteur.
Notre communauté d’Allonnes Arnage a eu cette chance (qui n’est probablement pas prête de se renouveler avant un bon moment !), d’accompagner successivement deux jeunes hommes, Gaël et Antoine, dans leur préparation immédiate aux ordinations diaconale et presbytérale. Puisse Dieu, si l’évêque les appelle, faire d’eux de vrais serviteurs de notre unité et de notre engagement.
Des textes que la liturgie nous propose en ce jour, je voudrais retenir deux figures, deux images qui peuvent illustrer ce que Jésus attend de ceux qu’il appelle à son service…
Celle du serviteur, bien sûr !
En nouant le tablier et en s’agenouillant devant ceux qu’il « n’appelle plus serviteurs mais amis » (……), Jésus nous montre à quoi il appelle ceux qui lui sont configurés par l’ordination diaconale ou presbytérale.
Notre ministère comme son nom l’indique d’ailleurs, s’enracine et trouve son fondement dans le service. « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. »
Le pape François ne cesse de nous rappeler que c’est à votre service que nous sommes ordonnés ! Puissions-nous ne jamais l’oublier…
Merci à vous de continuer à nous rappeler cette exigence de notre vocation pour que jamais, ni vous ni nous, ne nous laissions prendre au piège du cléricalisme.
L’autre image, c’est celle de l’agneau immolé.
Signe de l’ancienne alliance, l’image de l’agneau dont le sang est badigeonné sur les montants et le linteau des maisons où il sera consommé, est repris à son compte par Jésus.
Rappelez-vous lors du sacrifice d’Abraham, Dieu propose à Abraham de remplacer le fils qu’il était prêt à offrir par un bélier qui s’était pris les cornes dans un buisson…
Voilà qu’aujourd’hui, les choses s’inversent : Pour célébrer l’Alliance nouvelle et éternelle, Jésus qui est venu se prendre les cornes dans l’épaisseur de notre humanité, s’offre lui-même en sacrifice : « Ma vie, nul ne la prend c’est moi qui la donne… » (Jn 10,18)
Jésus nous propose, en mémorial de cette offrande, d’offrir le sacrifice d’action de grâce quoi consiste à célébrer l’eucharistie en mémoire de Lui.
« Faites-cela en mémoire de moi »… Le “cela” c’est le geste posé au soir du Jeudi-Saint et que nous rappelons en chaque eucharistie, comme Saint Paul lui-même nous l’a transmis.
Mais le “cela” dont il est question, c’est aussi le don que nous sommes invités à faire de notre vie en sacrifice d’action de grâce… Jésus nous invite à faire de nos vies, la nourriture de nos frères, en mémoire de Lui.
C’est là que s’enracine notre sacerdoce baptismal. Le sacerdoce que nous avons en commun depuis le jour de notre baptême qui nous a fait “prêtres, prophètes et roi” parce que membres du corps du Christ.
Les prêtres ou futurs prêtres que nous sommes ont été appelés au “sacerdoce ministériel” qui consiste, dans les sacrements, à agir au nom du Christ tête (in persona Christi capitis) pour le bien du corps entier.
Toutefois, si nous agissons au nom du Christ tête, cela ne doit jamais nous “monter à la tête” ! Au risque de devenir l’âne chargé de reliques qui croyait que l’encens et les cantiques qu’on lançait autour de lui était pour lui et qui se pavanait comme un paon…
Si nous ne devons pas devenir l’âne chargé de relique ne tombez pas vous-mêmes dans l’extrême inverse que dénonce le proverbe, chinois paraît-il, qui dit « Le doigt montre la lune et l’imbécile regarde le doigt » !
Aidez-nous, par la prière et la qualité de votre engagement et de vos remarques quand elles sont nécessaires, à savoir prendre notre place, toute notre place et rien que notre place.
Ne vous arrêtez non plus à nos petits-côtés ou à nos éventuelles qualités pour nous juger ou nous classer.
Aidez-nous par votre amour, comme vous le faites si bien déjà, à être les bons intendants, qui vous apporteront ce dont vous avez besoin pour être ce que Dieu attend de vous.
À l’école du Christ et en réponse à son appel, notre vie, comme la sienne, est donnée et personne ne peut nous la prendre.
Aidez-nous à faire fructifier en nous le don de Dieu. Alors nous pourrons, avec le psalmiste « offrir le sacrifice d’action de grâce.» Alors, avec vous et pour vous, nous pourrons « élever la coupe du Salut et tenir nos promesses au Seigneur devant tout son peuple.»